Dernière mise à jour : le 9 janvier 2024

La guerre sociale (91-89 a.-C.)

Date de publication : 09/11/2020

On a tendance à imaginer une péninsule italienne unifiée par et autour de Rome à la fin de la République. En réalité, la situation entre Rome et le reste de sa péninsule demeurait très tendue. La « guerre sociale » illustre parfaitement cette tension. Il ne s’agit bien évidemment pas d’une révolte des ouvriers agricoles. Ne tombons pas dans une vision marxiste ! Le nom de cette guerre provient d’une francisation extrêmement maladroite du terme latin socii signifiant les Alliés (italiens de Rome). Ainsi, il faut plutôt opter pour la « guerre des Alliés » ou la « guerre des Marses » pour avoir une transcription française plus conforme, mais la « guerre sociale » reste l’expression la plus utilisée.

La guerre sociale opposa les Romains à leurs Alliés italiens. Ce fut un événement marquant raconté par Diodore de Sicile (Ier siècle a.-C.), sujet grec vivant à Rome dans la deuxième moitié du Ier siècle a.-C. ; il fut, de fait, témoin des événements qu’ils nous narrent. Il écrivit d’une histoire universelle de quarante livres. La plupart de son œuvre nous est connue de manière fragmentaire. Le livre n°XXXVII dans lequel les faits de la guerre sociale sont expliqués, en fait partie. Il existe un deuxième texte issu de l’abrégé d’Histoire romaine de Velleius Paterculus (20 avant J.-C. – 30 après J.-C.) qui commence par Énée et se termine par son empereur Tibère (14-37 après J.-C.), dont il fait bien entendu l’éloge. Il avait un certain parti pris concernant la guerre sociale puisqu’il était issu d’une famille campanienne qui n’avait pas pris part à la « guerre sociale ». Les autres sources existantes sont constituées par les nombreux épigraphes existants. Il existe plusieurs recueils les recensant comme celui d’Attilio Degrassi (1887-1969) Inscriptiones latinae liberae rei publicae (I.L.L.R.R.), publié entre 1957 et 1963.

La guerre sociale eut lieu parce que, en plus, d’être une mosaïque de peuples, l’Italie était une mosaïque de statuts juridiques. Dans ce capharnaüm, trois principaux peuvent servir de fil conducteur : le statut des Romains, le statut des Latins (ici il faut comprendre le terme comme « habitants de la plaine du Latium ») et le statut des Alliés italiens. Depuis la fin de la deuxième guerre punique (218-202 a.-C.), les Latins voudraient acquérir le statut romain, et les Alliés, le statut des Latins. Malheureusement, les sénateurs romains ne voulaient pas leur donner. Une série de maladresses de leur part conduisit à la guerre sociale.

En 95 a.-C., une loi consulaire expulsa les Alliés italiens, habitants la cité de Rome. En 91 a.-C., le tribun de la Plèbe, Marcus Livius Drusus (?-?), tenta de modifier, à plusieurs reprises, le statut des Italiens. Son assassinat, en octobre 91 a.-C., fut l’étincelle qui mit le feu aux poudres. À Asculum, un préteur et son légat, ainsi que toutes les femmes romaines furent massacrés en représailles. Ce fut le début de la guerre sociale au terme de laquelle les Alliés finirent par obtenir la citoyenneté romaine qu’ils désiraient.

Qui se révolta ? On différencie deux groupes : les Sabelliques au nord (5 tribus) et les Osques au sud (3 tribus). Les Marses formaient l’essentiel des contingents au nord. Ils étaient dirigés par Quintus Popaedius Silo (?-?). Les Samnites formaient l’essentiel des contingents au sud. Ils étaient commandés par Caius Papius Mutilus (?-?). Ils furent rejoint pendant la guerre par des peuples du sud (Lucaniens, Pompéiens, Apuliens, Vénusiens). Les autres chefs cités par Velleius Paterculus furent le chef des Péligniens, Insteius Caton (?-?), Henrius Asinius (?-?), un Marrucin, deux samnites, Telesinus Pontius (?-?) et Marius Egnatius (?-89 a.-C.), et Caius Pontidius, dont l’origine reste inconnue. La centralité de Rome imposait deux fronts. Il demeure difficile de savoir si les révoltés du nord avaient des contacts avec ceux du sud afin de coordonner des attaques contre les Romains.

Les Alliés voulaient former une confédération. Ils prirent pour capitale Corfinium, qu’ils baptisèrent Italia (Diodore de Sicile) ou Italica (Velleius Paterculus). Le changement de nom de cette ville, inconnue avant la guerre, était hautement symbolique ; les socii voulaient donner un caractère fédéral à leur mouvement. Toutefois, ils prirent pour modèle, afin de le construire, Rome. En effet, la ville possédait un large forum et une curie, dans laquelle ils mirent en place un Sénat italique fédéral. Corfinium était également un choix judicieux puisque la ville était située entre les deux peuples, Marses au nord et Samnites au sud. De plus, située dans les Apennins, elle avait un caractère stratégique indéniable.

Le Sénat italique fédéral comptait 500 membres, contre 300 à Rome. Contrairement au Sénat romain, le Sénat italien avait des pouvoirs. Il désignait les magistrats et prenait des décisions. Le Sénat italien n’était pas constitué d’anciens magistrats comme à Rome. C’était une assemblée représentative des différents peuples révoltés. En ce sens, il était beaucoup plus démocratique et représentatif. Toutefois, le Sénat italien devint très vite une administration de guerre, et les sénateurs furent investis d’un pouvoir dictatorial. Ils élurent deux consuls (comme à Rome) et les douze préteurs pour un an. Ils partagèrent leur territoire en deux provinces consulaires. Le Marse Quintus Popaedius Silo (?-88 a.-C.) était le consul du nord, le Samnite Caius Papius Mutilus (?-?), celui du sud. Il y avait six préteurs par province. C’était également une originalité, car Rome n’avait que six préteurs depuis 198 a.-C.

Les Alliés eurent le temps de frapper une monnaie commune. À l’avers, une Victoire couronnée, symbole d’Apollon-Bacchus (Vitalia en osque), symbole des Samnites représentait le sud ; au revers, le taureau sabellique terrassant la louve romaine avec pour légende Italica, symbole des Marses, le nord.

L’organisation de l’armée italienne ressemblait à celle de l’armée romaine. Les deux consuls possédaient le haut-commandement en chef. Ils étaient secondés par des chefs originaires des différents peuples dont ils avaient le commandement.

Malgré ces symboles de puissance, le problème fondamental de cette confédération territoriale était sa non-durabilité, car l’union de ces peuples n’était maintenue que dans le but d’obtenir la citoyenneté romaine.

La connaissance des socii des tactiques romaines leur permettait de remporter des victoires très facilement. Le contingent des troupes des Alliés était 100 000 hommes (fantassins et cavaliers) contre au départ environ 30 000 romains. L’armée des Alliés était divisée en deux groupes : les Sabelliques (Marses, Péligniens, Vestins, Marrucins et les Picentes d’Asculum) au nord, et les Osques (Frentani, Hirsins, Samnites) au sud. Ils furent rejoint pendant la guerre par des peuples du sud (Lucaniens, Pompéiens, Apuliens, Vénusiens) et à la fin de la guerre, très brièvement, par les Étrusques et les Ombriens. Au centre, les colonies latines restèrent fidèles à Rome.

Au début de l’année 90 a.-C., Rome avait à sa disposition dix légions (deux consulaires, quatre d’Hispanie, la légion de Cisalpine et la légion de la Narbonnaise), puis par dix autres issues des contingents gaulois, hispaniques et africains. Ce qui faisait un total de 100 000 hommes du côté romain.

Les deux consuls de 90 a.-C. se divisèrent en deux fronts à l’instar des Alliés. À Rome, les consuls de 90 a.-C. étaient Publius Rutilius Lupus (?-90 a.-C.) et Lucius Julius Caesar (135-87 a.-C.) (Attention ! Parent, mais rien à voir avec Jules César).

Publius Rutilius Lupus prit sous son commandement l’armée romaine du nord. Il avait sa disposition deux légions divisées entre ses cinq légats (fonctionnaire romain adjoint d’un autre). En Picenum, le légat Cneius Pompée Strabon fut rejeté dans Firmum (Fermo aujourd’hui). Le 11 juin 90 a.-C., sur le Turano, Rutilius, Pompée Strabon et Caius Marius (157-86 a.-C.) furent vaincus par l’armée Alliée du nord. Au cours de cette bataille, Rutilius, trop pressé d’en finir, fut tué. Les Romains prirent une raclée monumentale. Un de ces légats, Cneius Pompée Strabon (?-?), partit combattre dans le Picenum. Il commença le siège d’Asculum. Puis, les Alliés réussirent à le bloquer à Firmum. Un autre légat, Caius Marius, prit le commandement de l’armée de Rutilius. Par la suite, Marius parvint à obtenir quelques succès avec les Marses.

Au sud, Lucius Julius Caesar était un petit peu plus chanceux. Il battit, notamment Papius en Campanie. Les troupes des socii du sud furent également victorieuses. Ils devinrent maîtres de Venusia (Venosa aujourd’hui) et de Pompei en Campanie. Ils assiégèrent la place forte de Æsernia (Isernia aujourd’hui). En été 90 a.-C., une trêve fut conclue entre les deux camps pour les moissons. Pendant la trêve, les généraux romains firent revenir en Italie les légions disponibles les quatre légions d’Hispanie, la légion de Narbonnaise et la légion de Gaule Cisalpine, ainsi que dix autres issues des contingents gaulois, hispaniques et africains.

Pendant la trêve, en 91 a.-C., le tribun de la Plèbe, Varius (?-?), d’originaire d’Hispanie, fit voter une loi inculpant de haute-trahison (majestas) ceux qui excitèrent la révolte italienne. Lucius Julius Caesar fit également voter la loi Julia qui donnait la citoyenneté romaine à tous les Latins et à tous les Alliés qui n’avaient pas pris les armes ou qui les déposeraient. L’objectif était qu’ils n’entrassent pas dans le conflit ou qu’ils le stoppassent. La loi Calpurnia complétait la loi Julia. Elle donnait aux imperators (c’est-à-dire quelqu’un qui avait reçu le triomphe) le pouvoir d’offrir la « cité » prise à leurs soldats pérégrins (c’est-à-dire étrangers, ici les gaulois, hispaniques et africains) et leur donner le droit de cité. Ils pouvaient également donner le droit de cité aux peuples vaincus. La loi Plautia Papiria accordait le droit de cité, à titre individuel, aux habitants des villes alliées qui s’adresseraient à un préteur dans les soixante jours après le vote de cette loi. Deux censeurs furent nommés exceptionnellement pour inscrire les nouveaux citoyens sur les huit tribus romaines que l’on leur avait attribuées.

Bref, Rome cherchait à apaiser le conflit en donnant aux Alliés ce qu’ils voulaient, mais elle était prête à reprendre les armes si nécessaires.

Néanmoins, à cette époque, Rome était soumise aux généraux qui faisaient sa gloire, et le Sénat romain n’arrivait plus à se faire obéir. En 89 a.-C., conformément aux lois romaines, les deux nouveaux consuls furent choisis Lucius Porcius Caton (?-89 a.-C.) et Cneius Pompée Strabon (?-87 a.-C.). La famille des Pompée était divisée en trois branches : les Rufus, les Sextus et les Longinus. Cneius Pompée Strabon est un Sextus. C’était le fils de Sextus Pompée qui avait été un brillant orateur, un philosophe stoïcien et un géomètre. Il mourut foudroyer en 87 a.-C. ; son corps fut jeté dans le Tibre par ses soldats.

Les autres généraux qui prirent part aux futurs combats étaient Caius Marius (156-86 a.-C.), Lucius Cornelius Sylla (ou Sulla) (138-78 a.-C.), Quintus Caecilius Metellus Pius (130-64 a.-C.) et Quintus Caecilius Metellus dit le Numidique (152-91 a.-C.). Caius Marius, né d’une famille paysanne, était un chef militaire qui s’était illustré dans la guerre de Jugurtha (109-107 a.-C.). Il avait été élu consul en 107, puis cinq années consécutives de 104 à 100. C’était une homme de poigne et à poigne. Lucius Cornelius Sylla (ou Sulla) (138-78) était un général. Il fut le légat de Caius Marius pendant la guerre de Jugurtha. Il fut préteur en 93 a.-C. Quintus Caecilius Metellus Pius (130;-C.-64 a.-C.) fut préteur, après la guerre sociale, en 88 a.-C. Il était le fils d’un consul de 109 a.-C. Quintus Caecilius Metellus dit le Numidique (152-91 a.-C.) était un autre des vainqueurs de Jugurtha. Pour faire face aux socii, les consuls firent appel à de nombreux vétérans bien expérimentés. Si la guerre se poursuivait, alors les victoires serait dans le camp romain, et non dans celui des socii.

La plume des sénateurs fut tout aussi efficace que l’épée des généreux. La moitié du contingent des socii accepta les nouvelles lois et se rendirent. De fait, ils s’étaient profondément divisés. Des socii, il ne restait quasiment que les extrémistes. Ainsi, la guerre ne pouvait que se poursuivre, et les citoyens romains conservèrent leur sagum, manteau en laine, symbole de la guerre, nous écrivait Velleius Paterculus.

Au nord, à la fin 90 a.-C., Cneius Pompée Strabon débloqua Firmum. Il reprit par la suite l’offensive dans le Picenum. En janvier 89 a.-C., la plus grande bataille de la guerre eut lieu : 60 000 Romains battirent 75 000 Alliés. Le siège d’Asculum reprit alors. Il nettoya la reste de la « province Sabellique ». Il obligea les Alliés à évacuer leur capitale et à se replier dans le Samnium. Les habitants d’Asculum se rendirent le 18 novembre 89 a.-C. Cette victoire était symbolique, car tout avait commencé là-bas. La prise d’Asculum marquait l’arrêt officiel des combats. Néanmoins, la guerre se prolongea à certains endroits jusque 80 a.-C. Le 25 décembre 89 a.-C., Cneius Pompée Strabon fit son triomphe à Rome, et devint imperator.

Cneius Pompée Strabon fut le premier des imperators à donner le droit de cité pour conduite héroïque (virtutis caussa), et à user de la loi Culpurnia. Les indigènes hispaniques furent recrutés pendant la guerre sociale en très grand nombre. Il s’agissait généralement de Celtibères. Une inscription d’Asculum prouva que la voie d’intégration politique la plus efficace et la plus rapide, au monde romain, était l’armée. Au conseil, qui attribua la citoyenneté aux pérégrins, siégeaient Cneius Pompée Magnus (106-48 a.-C.) (le futur ennemi de Jules César), Catilina (108-62 a.-C.), qui firent leurs premières armes, et un grand nombre d’hommes d’origine italienne non romaine, ce qui était surprenant. La citoyenneté fut remise à la « turme de Sallvius », une turme étant un escadron de trente cavaliers, commandés par un décurion. La remise de la citoyenneté à la trentaine d’hispaniques se fit comme d’habitude, à l’époque, de manière religieuse. On leur remet : « une petite corne » (symbole de la prospérité), « une patelle » (un vase sacré, une sorte de plat servant aux libations), « un collier », « un bracelet », « des phalères » (de gros papillons nocturnes) et « une double ration de blé » (capital dans un pays où le problème de la nourriture était important, ce geste était l’expression d’un grand honneur). Néanmoins, rien ne prouve que ces hispaniques restassant en Italie.

Au sud, les socii furent obligés de se replier dans le Samnium, à Æsernia, où ils déménagèrent le Sénat italien, et où ils s’unirent autour du Marse, Quintus Popaedius Silo. Le commandant en chef constitua une nouvelle armée de 50 000 hommes, en y enrôlant notamment des esclaves affranchis, comme le faisaient les Romains par ailleurs. En 90 a.-C., il prit Bovianum, capitale Samnite, et il y déménagea une nouvelle fois le Sénat italien. Le dernier espoir des Alliés était de trouver un allié extérieur, ennemi de Rome. Leur choix se porta vers le Mithridate Eupator (135/132-63 a.-C.), roi du Pont de 120 à 63 a.-C. Malheureusement pour Popaedius, le roi du Pont était en train de mettre la main sur l’Asie Mineure lors d’une importante campagne militaire. Ainsi, lorsque ce dernier envoya ses émissaires, il avait laisser passer sa chance de conquérir Rome. En 90 a.-C., le consul Lucius Porcus Caton fut tué lors d’un combat contre les Marses. Son légat, Sylla (138-78 a.-C.), bloqua les Alliés à Nole et Pompei, et pénétra dans le Samnium après la victoire sur après la victoire sur Aulus Cluentius Habitus (?-?). Il commença le siège de Nole, qui prit fin en 88 a.-C. sous la consulat romain d’Appius Claudius Pulcher (?-?).

En 88 a.-C., Cneius Pompée Strabon, redevenu légat, soumit les Vestins, les Péligniens et les Marses. Venusia fut réoccupée. La même année, Lucius Cornelius Sylla fut alors élu consul en remerciement des victoires qu’ils avaient obtenues. Le second consul choisi était Quintus Pompée Rufus (?-88), issu de la branche des Pompée Rufus. Il avait été préfet de Rome en 99 a.-C., et avait déjà été consul en 97 a.-C. Il fut assassiné la même année par les soldats de Cneius Pompée Strabon, car il avait voulu prendre le commandement de l’armée du nord.

D’après Velleius Paterculus, « cette guerre dévora plus de trois cent mille hommes, la fleur de l’Italie ». Il est à noter que le chiffre avancé semble être cohérent par rapport aux registres romains et aux fouilles archéologiques. Avec la fin des hostilités, les citoyens romains remirent leur toga, manteau en laine, symbole de paix, pour une courte période.

Pour gagner la guerre, les Romains furent obligés de concéder la citoyenneté romaine à toute la péninsule italienne, à l’exception de la province de Gaule Cisalpine, qui, en vertu de la loi de Pompée de 89 a.-C., devint une province latine. Ce fut César (100-44 a.-C.) en 49 a.-C., qui leur donna le statut des Latins. Par ailleurs, en 88 a.-C., les Samnites et Lucaniens n’avaient pas obtenu la citoyenneté, mais ils l’obtinrent quelques années après. Avec la fin de la guerre sociale, l’Italie était réellement devenue romaine ; il n’y avait plus de distinction entre les différentes cités de la péninsule. Cette vision était bien portée par Diodore de Sicile qui voyait dans l’empire romain, qui était en train de se former, un retour à l’empire universel d’Alexandre le Grand (356-323 a.-C.). Ainsi, il ne comprenait pas pourquoi il ne pouvait pas devenir « citoyen de cet empire ». Alors bien évidemment, il avait tendance à glorifier certains faits de guerre, sans importance historique majeure, des Alliés. Toutefois, était-ce bien son message ? Il ne faut pas oublier non plus que le fragment relatant la guerre sociale était issu des abrégés byzantins ; c’est un texte qui fut manipulé de nombreuses fois. Velleius Paterculus, quant à lui, écrivit sous l’Empire. Il tenta de montrer comment les agitations populaires avaient mis en danger Rome. Son témoignage reste intéressant dans la mesure où il fait partie d’une famille d’origine italienne qui avait obtenu l’accession à la citoyenneté juste après cette guerre. Néanmoins, il ne faut pas oublier qu’il écrivait lors d’une importante période de censure. Dans ce cadre, les documents épigraphiques demeurent les témoignages le plus importants, car elles furent gravées vraisemblablement pendant la guerre sociale. De fait, il reste une possibilité que la connaissance de l’histoire des socii révoltés évolue dans les prochaines années.

La « guerre sociale » fut très longtemps comparée, à tort ou à raison, à la guerre de Sécession américaine (1860-1865). Il est vrai que, après la « victoire politique » des Alliés, ils eurent, tout comme les Afro-américains, beaucoup de difficulté à s’intégrer dans la vie politique romaine.

Le Sénat romain généralisa le système municipal, qui avait été un processus de romanisation avéré. Le municipe était une cité qui avait obtenu les droits civiques romains. On créa également des cantons (ou pagi). L’ager romanus s’effaça derrière le processus d’uniformisation. On vit ainsi l’entrée dans la politique romaine des classes dirigeantes italiennes, qui remplacèrent petit à petit les vielles familles romaines au Sénat et dans les magistratures. Toutefois, la distance entre les cités italiennes et Rome faisait que le Sénat romain avait, à partir de la fin du Ier siècle a.-C., un taux d’absentéisme important. Du mixage aristocratique, naquirent deux groupes politiques : les « populaires » (populares) et les « conservateurs » (optimates). Comment intégrer les nouveaux citoyens (novi cives) dans les tribus romaines ? Le débat consistait à savoir s’il fallait agrandir le nombre de tribus. À la fin du IIe siècle a.-C., on avait recensé 395 000 citoyens romains, au recensement de 70-69, 910 000 citoyens romains. On passa du simple au double. On ne sait pas, à l’origine, combien de tribus furent données par le Sénat romain aux socii, car les sources divergent sur ce point : 8 sur 35 selon Velleius Paterculus, 10 sur 35 selon Appien (vers 95- vers 165 p.-C.). Ce n’est qu’en 84 a.-C. qu’un sénatus-consulte inscrivit les Italiens dans les 35 tribus romaines. Néanmoins, leur inscription définitive se fit effectivement sous la dictature de Sylla (82 ; 80 ; 79 a.-C.)

La « guerre sociale » finit vers 88 a.-C., et déjà une nouvelle guerre dite « civile » commençait. Toutefois, la politique d’intégration menée par les imperators, consistant à donner la citoyenneté romaine aux contingents indigènes, constitua la force du futur Empire romain, et fit l’Empire pendant près de cinq siècles.

Maxime Forriez.

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